Durant les 3 premières années de sa résistance anti-viêtna-mienne, profitant de l'état de choc de l'opinion internationale et des crises qui secouent le monde entier, Sihanouk explorera toutes les possibilités d'aboutir à un accord direct avec les viêt-namiens, en même temps qu'il se préparera -et préparera ses par-tisans- à l'éventualité d'une action de plus large envergure desti-née à soutenir une lutte de longue haleine.
Dans les mois qui suivent l'invasion et l'occupation du Cam-bodge par les troupes viêtnamiennes, le climat international est en crise: récession dans la plupart des pays occidentaux, affaire des Euro-missiles qui inquiète profondément les Européens et divise les opinions publiques, l'invasion de l'Afghanistan par l'-Armée Rouge, punition de la Chine à la RSVN créant un vérita-ble précédent dans les relations entre pays communistes, et af-faire des otages de l'Ambassade américaine à Téhéran qui ébran-le complètement l'administration Carter qui n'en avait guère besoin.
La question khmère n'est donc qu'une péripétie parmi des évènements tous plus dramatiques les uns que les autres, mettant en péril la paix mondiale. La première réaction de Sihanouk sera donc de profiter de la confusion internationale pour tenter de ré-gler directement avec les dirigeants de Hanoï le problème khmer avant que celui-ci ne dépasse ses principaux protagonistes, à sa-voir les khmers et les viêtnamiens eux-mêmes.
Après avoir rédigé son livre, et avant même que celui-ci ne soit édité, Sihanouk lancera de Pyong Yang un appel à la créa-tion d'un vaste rassemblement des khmers non communistes, la Confédération des khmers nationalistes, dans le but de donner une large assise populaire à ses efforts pour établir un dialogue entre lui et les dirigeants de Hanoï. Pour justifier l'évincement des khmers-rouges de ce rassemblement, il les accusera de n'être que les instruments de la RPC dans la guerre que se livrent les 2 églises communistes, celle des léninistes de Moscou et celle des marxistes de Pékin, par viêtnamiens et khmers interposés. Pour le prince Sihanouk, tant que cette guerre idéologique servira de toile de fond au problème khmer, elle empêchera toute solution rapide à celui-ci. Seuls les nationalistes khmers, unis dans la re-cherche d'une même solution, pourraient servir d'interlocuteurs valables pour le Viêtnam.
En Décembre 1979, devant plus de 4.000 réfugiés khmers de France et d'Europe réunis au Pavillon Baltard, il développe ce thème et conclut en demandant à ses compatriotes de lui laisser le temps de convaincre Hanoï du bien-fondé de son analyse et d'accepter de négocier avec lui les conditions de leur retrait du Cambodge. A cette occasion, il révèle qu'il écrira 3 lettres à Pham Van Dong, alias Lam Ba Kiêt, premier ministre viêtnamien, pour le persuader de conclure rapidement le différend khméro-viêtnamien sans la participation des communistes pro-chinois.
Malheureusement, le Prince ne sera pas suivi dans cette ten-
tative de dialogue et ce, principalement, à cause de la méfiance qu'il inspire à certains groupes de khmers ainsi qu'à une Coali-tion d'intérêts entre les pays de l'ASEAN, les USA qui n'ont ja-mais cru à l'indépendance de Sihanouk par rapport à Pékin, et la RPC qui craignait une solution contraire à ses intérêts. C'est ainsi que le 9 Octobre 1979, pour bien montrer son hostilité aux propositions du Prince, Son Sann, ancien premier ministre du royaume du Cambodge, crée le FNLPK, qui constitue en lui-même et à cause de la date de sa création un désaveu de la poli-tique de Sihanouk et une attaque personnelle contre lui.
De même, alors que Sihanouk propose aux différentes ins-tances internationales de voter en faveur de la vacance du siège du Cambodge parce que ses représentant légaux -les communis-tes pro-chinois ou les khmers-rouges- ne peuvent, légitimement représenter une nation qu'ils ont détruite, l'ONU votera massive-ment grâce à la pression de l'ASEAN, de la RPC et des USA, pour le maintien de la République Démocratique du Kampu-chéa.
En Janvier 1980, lorsque Sihanouk retourne en Corée du nord, c'est pour annoncer sa retraite politique qui correspond à une période durant laquelle il précisera sa position par rapport aux KR et au FNLPK, ainsi que sa vision de l'environnement in-ternational du problème khmer. Au moment-même où le FNLPK était créé, la Confédération des khmers Nationalistes (CKN) était décédée avant de naître. En effet, pour réussir, la CKN se devait de rassembler tous les khmers non communistes autour de Siha-nouk et en vue d'une solution rapide à la question khmère. De ce fait, lorsque samdech annonce sa décision de démissionner de la présidence de ce mouvement, la CKN deviendra un corps sans âme. Cette âme, Sihanouk allait s'attacher à la lui rendre.
Depuis sa création, le FNLPK ne s'était jamais déterminé en faveur d'une solution précise du problème khmer. De ce fait, pour se démarquer du laxisme politique du mouvement de Son Sann, et pour rallier ses partisans autour de propositions concrè-tes, Sihanouk recommencera à faire publier par son secrétariat son Bulletin Mensuel de Documentation dans lequel il s'adresse directement à ses compatriotes et précise, point par point, les principaux éléments de sa position vis-à-vis du problème khmer. Si le FNLPK pèche par laxisme et irréalisme politique, les KR sont inacceptables aux yeux de Sihanouk à cause de leurs crimes passés et de leur alliance totale avec la RPC dont les intérêts fondamentaux sont en désaccord avec ceux du RSVN dans la région. Les KR sont alors un obstacle à toute solution. Sur le plan international, à part un consensus total dans la condamna-tion du Viêtnam, il n'existe toujours aucune action diplomatique en vue de faire évoluer la situation. Trois groupes de pays se distinguent alors précisément: le Viêtnam, soutenu par l'URSS et ses alliés, la Chine Populaire et les pays de l'ASEAN soutenus par les Etats-Unis d'Amérique.
En 1980, tous ces pays s'interrogent encore sur les axes de leur politique vis-à-vis du problème khmer. Si leurs intérêts sont clairs, leur politique ne l'est pas encore. C'est dans ce climat d'-incertitude que Sihanouk cherchera à faire valoir ses idées, com-prendre ses propositions et en accepter le bien-fondé. Pendant ce temps, la RPC fera tout ce qu'elle pourra pour convaincre alter-nativement Sihanouk et Son Sann d'accepter une union avec les khmers-rouges alors que des pressions s'exercent pour que les Nationalistes s'unissent sous une même bannière.
Dès 1980, l'idée d'une Union sacrée entre tous les mouve-ments khmers commence à cheminer. Cependant les positions de chacun d'eux reste alors radicalement divergents:
- Sihanouk étant attaché à l'idée d'une solution politique,
- les pro-chinois restant les tenants d'une solution militaire, de la "victoire totale".
- le FNLPK tentant de se donner une identité par une atti-tude critique envers le Prince d'un côté et les KR de l'au-tre.
Au début de l'année 1981, Sihanouk invite plusieurs person-
nalités khmères à un congrès à Pyong Yang au terme duquel sera créé le Front Uni National pour un Cambodge Indépen-dant, Neutre, Pacifique et Coopératif (FUNCINPEC). Désormais, la résistance contre l'occupation viêtnamienne au Cambodge pos-sède 3 mouvements distincts pouvant permettre une unification structurelle sans trop de déséquilibre entre chacun d'eux. Aussi-tôt créé, le FUNCINPEC réaffirme en même temps que samdech Sihanouk, son président, les principaux points de sa position à l'égard de la question khmère. Cette position sera résumée dans une lettre ouverte de Sihanouk aux participants à la Conférence Internationale sur le Cambodge, réunie sous l'égide de l'ONU à New York en Juillet 1981.
Lorsqu'en Août 1981, Son Sann rend visite à Sihanouk à Mougins (France), et lorsque les 3 leaders de la résistance anti-viêtnamienne se réunissent tous ensemble, pour la première fois depuis 1979, le 4 Septembre 1981 à Singapour, les bases d'une Coalition étaient jetées. Ils signent, à cette occasion, un "Com-muniqué conjoint" dans lequel ils affirment leur volonté de taire leurs différends et d'unir leurs efforts dans la lutte anti-viêtna-mienne au Cambodge. Samdech Sihanouk (FUNCINPEC: Front Uni National pour un Cambodge Indépendant, Neutre, Pacifique et Coopératif), Samdech Son Sann (FNLPK: Front National de Libération du Peuple Khmer) et Monsieur Khieu Samphan (FGUNPDK: Front de Grande Union Nationale Patriotique et Démocratique du Kampuchéa) tournaient ensemble une page de l'histoire du Cambodge. Cependant, ni Sihanouk, ni le FUN-CINPEC n'ont abdiqué leur volonté d'unité, sinon d'union, avec le FNLPK, et par le biais d'une coopération renforcée à tous les niveaux, soutenus par une base de plus en plus lasse de querelles stériles, ils conservent l'espoir d'y parvenir à terme.
Les 22 Juin 1982 la Coalition verra véritablement le jour à Kuala Lumpur et ouvrira un nouveau chapitre dans la lutte con-tre l'agression viêtnamienne Sur le plan international, la situation s'est également peu à peu décantée. Au sein de l'ASEAN, l'Indo-nésie et la Malaisie se sont, dès 1983, prononcées en faveur de l'ouverture d'un dialogue avec la RSVN, dialogue qu'ils n'ont d'ailleurs jamais rompu. Dans le même temps, l'Australie, à la faveur d'un changement de majorité parlementaire et gouverne-mentale, se propose de servir d'intermédiaire dans cet éventuel dialogue. En Europe, la France et la Suède avaient déjà adopté la même attitude depuis le début du conflit. La RPC restait le seul pays à refuser ce dialogue avec le RSVN et s'isolait donc du reste d'une Communauté Internationale soucieuse de résoudre rapidement et pacifiquement le problème khméro-viêtnamien.
Les 2 objectifs de la stratégie de Sihanouk consécutive à la création du GCKD sont donc partiellement atteints. Ils concou-raient tous 2 à augmenter la pression politique et diplomatique sur le Viêtnam pour le forcer à accepter des négociations, en lui faisant supporter l'entière responsabilité de l'impasse diploma-tique du problème. Cependant, l'intransigeance de la RPC d'un côté, et le manque d'unité entre les 3 composantes de la coalition de l'autre, ont constitué des encouragements au Viêtnam dans sa politique de force. La récente offensive viêtnamienne est une illustration de cette politique de force et de sa volonté d'imposer une solution militaire identique à celle de la Chine et de la fac-
tion de Khieu Samphan.
Les termes de l'équation khmère restent donc inchangés et seul le rapport des forces évolue. Sur le plan militaire, la pres-sion s'accentue sur le Viêtnam pendant que ses efforts en vue de diviser les 3 factions khmères entre elles aboutissent à l'effet inverse, et que la contradiction entre ses propos rassurants et la violence de ses actions militaires lui ôte le peu de crédit lui restant. Même si Sihanouk ne la souhaite pas, la solution mili-taire pourrait bien, du fait du seul Viêtnam, rester la seule envi-sageable et ses récentes déclarations publiques aussi bien que privées vont dans ce sens.
Quoi qu'il en soit, il faut que Hanoï se persuade que le temps travaille en faveur de l'unification progressive des forces de la résistance khmère et que, peu à peu, l'objet d'éventuelles négociations s'amenuise. D'un problème international en 1979, l'occupation du Cambodge est devenue un problème régional. Lorsque la résistance khmère sera totalement privée de ses spon-sors, il ne restera qu'un problème bilatéral entre le Cambodge et le Viêtnam. Les khmers, dépossédés de leur pays, n'ont plus rien à perdre. Le Viêtnam, au contraire pourrait être l'unique perdant dans ce jeu.
L'Union nationale!... Quelle union? Il est courant d'enten-dre que les khmers souhaitent voir réaliser l'Union nationale. A écouter les opinions émises, je constate que les uns veulent une union unitaire, alors que les autres se contentent d'une union pluraliste. Il serait donc intéressant de savoir quelle union conviendrait le mieux au peuple khmer, dans le contexte actuel. Les partisans de l'union unitaire n'ont fait, jusqu'ici, qu'exprimer leur désir sans se soucier de savoir comment la réaliser. Selon eux, le dicton "l'Union fait la force", le patriotisme et le rapport des forces en présence -l khmer contre au moins 3 ou 4 viêtna-miens- suffisent pour mener les khmers à s'unir en un seul corps s'ils veulent mener à bien leur lutte de libération nationale. Ils soutiennent que cette lutte ne serait crédible qu'à condition que le peuple khmer s'unisse au sein d'un mouvement de résistance unique, dirigé par un Chef unique, accepté par tous. On a cité, pour appuyer cette idée, des noms célèbres de chefs de résis-tance dans d'autres pays, comme le général Charles De Gaulle en France et de Mao Tse Toung en Chine Populaire. Mais on oublie souvent qu'au temps de la résistance française contre l'-occupation allemande le général d'armée Henri Giraud co-pré-side avec De Gaulle le Comité Français de Libération Nationale. Quant à la résistance chinoise contre l'occupation étrangère, elle fut conjointement menée par les Communistes, et les Nationa-listes dirigés par le maréchal Chiang Kai Chek, sans qu'il y ait de direction unitaire.
Le désir de réaliser cette union "unitaire" est très légitime et ce serait parfait si l'on pouvait atteindre cet objectif. Mal-heureusement il ne s'agit là que d'une utopie qui n'existe que dans l'imagination. Dans un groupe d'individus, et, à fortiori, au sein d'une Nation -si petite soit-elle- les intérêts des uns ne coïn-cident pas toujours avec ceux des autres et l'intérêt général n'est pas toujours perçu de la même façon par tous. Il est donc naturel qu'à l'intérieur de toute collectivité existent des relations diffi-ciles ou même conflictuelles. On peut les admettre, pourvu qu'-elles ne nuisent pas à l'intérêt supérieur de la Nation.
Actuellement, dans le cas du Cambodge, 3 mouvements au sein d'une Coalition. Leur dénominateur commun est constitué par leur ferme détermination de combattre l'expansionnisme viêt-namien. Mais comment mener efficacement ce combat? C'est à cette question que répondent les partisans de l'union pluraliste. Ils espèrent que, malgré la diversité de leurs tempéraments et de leurs choix politiques, les dirigeants de ces mouvements trou-veront suffisamment de hauteur de vue et de noblesse de coeur pour servir la nation en bonne intelligence et en étroite colla-boration les uns avec les autres. Pourtant les opinions divergent encore sur ce point: certains désirent une union entre nationa-listes uniquement, d'autres, une union sans exclusive. Les pre-miers soutiennent la fusion du FNLPK avec le FUNCINPEC ou, tout au moins, une coopération renforcée entre eux. Du fait que ces 2 mouvements soient très proches l'un de l'autre sur le plan idéologique, leur union ne serait effectivement pas impossible. Mais quel serait le but de cette Union? Si l'Union des 2 mouve-ments nationalistes (les sihanoukistes et les républicains) est des-tinée à remplacer la coalition tripartite actuelle comme le récla-ment ouvertement certains, elle devient source de dangers pour la lutte nationale de libération.
En effet, au lieu d'unir davantage, elle ne ferait que diviser; au lieu de travailler en faveur de la réconciliation nationale, elle promouvoit, d'une certaine manière, l'esprit de revanche, ce qui a pour conséquence directe d'affaiblir les forces de résistance au bénéfice du seul agresseur viêtnamien. Cette forme d'union ne correspond ni aux souhaits des pays amis, ni aux aspirations pro-fondes du peuple khmer qui désire la paix civile et la concorde nationale.
En revanche elle correspond aux espoirs viêtnamiens qui ne cessent de chercher tous les moyens pour diviser les rangs de la résistance khmère aussi bien que le bloc des Nations qui sou-tiennent celle-ci. Il serait souhaitable que ceux qui cherchent à promouvoir ce type d'Union sélective méditent sur toutes les conséquences qui ne manqueraient pas de rejaillir inéluctable-ment sur le peuple khmer qui ne prendra part plus massivement à la lutte actuelle que dans la perspective d'un retour immédiat à la paix après le retrait viêtnamien. Par contre, si le resserrement des liens entre le FNLPK et le FUNCINPEC n'est dicté que par le souci d'équilibre des forces en présence au sein de l'actuelle coalition, il est de nature à n'inquiéter personne. La liaison étroi-te des 2 mouvements nationalistes est même indispensable car la réunion de leurs 2 forces pourrait constituer une sorte de dissua-sion vis-à-vis du FGUNPDK qui n'a pas encore recouvré la confiance du peuple khmer. Elle serait, en conséquence, de na-ture à rassurer ceux qui ont encore des doutes sur la nouvelle orientation politique proclamée par la 3ème composante. Du mo-ment qu'elle tend à raffermir la force des nationalistes sans pour autant chercher à freiner manu militari le développement des forces du 3ème partenaire, elle ne fait aucun obstacle à l'actuelle coalition. Les défenseurs de cette dernière formule d'union, pour appuyer leur point de vue, soutiennent en particulier que l'Union tripartite a remporté l'adhésion de la majorité des membres des 3 mouvements, en même temps qu'elle a été fortement souhaitée par les pays amis.
En effet, c'est après consultation et informations préalables de leurs partisans respectifs que les dirigeants des 3 mouvements se sont rencontrés à plusieurs reprises et ont convenu finalement de mettre sur pied le présent GCC. C'est donc une union libre-ment consentie par chacune des parties qui a pris ses décisions en toute connaissance de cause et de conséquence. Par ailleurs, la porte du GCC reste ouverte à toute autre faction khmère pourvu qu'elle ne coopère pas avec les envahisseurs viêtna-miens. En outre, parce qu'il a été souhaité par les pays amis du Cambodge, le GCC bénéficie d'un soutien et des aides militaires toujours accrues de la communauté internationale.
Pour ne citer qu'un exemple, depuis 2 années consécutives la question du siège n'a même pas été posée devant l'Assemblée Générale des Nations-Unies et la Résolution condamnant l'occu-pation du Cambodge par les troupes viêtnamiennes et exigeant le retrait de celles-ci a été votée à une majorité jamais atteinte depuis 7 ans: 114 voix contre 21 et 16 abstentions. Enfin, depuis qu'ils sont unis au sein de la coalition, les 3 mouvements ont reçu davantage d'aides étrangères -notamment en armes et muni-tions- qu'auparavant. Cela a permis à la résistance de renforcer ses positions et d'accentuer sa pression militaire, en particulier lors de la dernière saison sèche 1983-84. Ainsi, de toutes les for-mes d'union avancées par les uns et par les autres, seule la Coalition tripartite est actuellement crédible. Elle permet pour l'instant aux khmers de ne pas retomber dans une erreur com-mise dans un passé récent: l'exclusion d'une partie de la commu-nauté nationale de la vie démocratique pour des raisons politi-ques. Elle constitue ensuite la seule forme d'union pouvant don-ner satisfaction à la majorité des nations amies désireuses de soutenir la juste lutte de libération du peuple khmer. Il n'y a donc pas lieu de perdre son temps dans la recherche d'une nou-velle formule d'union. Il convient plutôt d'aller de l'avant, de soutenir les efforts de la Coalition et de l'aider à se renforcer davantage.
L'heure n'est plus aux sanglantes passions ou aux divisions fratricides: elle est à la raison et à la coexistence pacifique et à la recherche de la réconciliation nationale. C'est dans ce sens qu'-oeuvre le FUNCINPEC. Nombre d'observateurs se sont interro-gés sur la position de la RPC, de qui on attendait la 2ème punition après les revers des forces armées de la Coalition de 1984-85. Parmi leurs conclusions, certains ont été jusqu'à avancer qu'il existerait des accords secrets entre Pékin et Moscou conclus lors de la visite d'Arkhipov à Pékin en Novembre 1984. Ces analystes pensent donc que les négociations actuellement en cours entre ces 2 capitales ont évolué plus rapidement que ne le laissent penser les laconiques communiqués publiés par les 2 parties au terme des discussions. Une des conséquences de ces Accords serait un désengagement de la Chine vis-à-vis de la résistance khmère. De fait, il n'y a pas eu de 2ème leçon chinoise au Viêt-nam et ce, malgré les pressants appels lancés par Sihanouk en Février et Mars 1984. Interrogé à ce sujet à Paris, par un journa-liste français, un diplomate chinois en poste à Paris répondait que la Chine avait toujours eu pour principe de ne répliquer que lorsqu'elle était agressée. Le Viêtnam n'ayant pas agressé la Chine comme il l'avait fait en 1979, il n'y a pas eu de réplique. En clair, cela signifie que le contexte historique a évolué par rapport à 1979, ce qui implique nécessairement la mise en oeu-vre d'une autre politique.
Depuis l'arrivée au pouvoir de Deng Xiao Ping, la Commu-nauté internationale s'accorde pour affirmer que la nouvelle di-rection chinoise est pragmatique. De ce fait, au lieu d'analyser la politique khmère de Pékin par rapport à d'hypothétiques accords Sino-Soviétiques, il serait peut-être plus positif de le faire par rapport à la propre logique chinoise, éclairée, précisément, par ce
pragmatisme.
Trois points fondamentaux faisaient obstacle à une norma-lisation des relations Pékin-Moscou: le déploiement militaire so-viétique à la frontière chinoise, l'invasion de l'Afghanistan par l'Armée rouge, l'agression du Cambodge par la RSVN et les So-viétiques. Aucune évolution de la situation sur ces 3 points n'a pu être constatée et, en conséquence, les intérêts vitaux de la RPC restent toujours menacés. Tant que ses intérêts seront me-nacés, la logique veut que Pékin conserve toujours la même posi-tion de principe sur ces points. A partir de là, il est évident que l'absence de 2ème leçon chinoise ne signifie pas modification de la position chinoise vis-à-vis du problème khmer, sur le plan du principe. Il faut donc rechercher les causes de la passivité chi-noise ailleurs. En premier lieu, l'Armée populaire viêtnamienne n'a pas lancé son offensive simultanément mais successivement contre les bases du FNLPK et puis contre celles des KR et enfin celles de l'ANS/FUNCINPEC. Le fait pour la Chine d'intervenir après la chute de telle ou telle base pouvait être interprété com-me étant le signe évident du soutien particulier de Pékin à telle composante de la Coalition khmère. Or, Pékin soutient la résis-tance khmère dans son ensemble, et non pas telle ou telle fac-tion. Elle a affirmé, et prouvé par son rôle, qu'elle désirait entre-tenir des relations équidistantes avec les 3 mouvements formant la coalition. Déclencher une opération de représailles contre le Viêtnam pendant ou après les combats pour telle ou telle base aurait donc été une contradiction que Hanoï n'aurait certaine-ment pas manqué d'exploiter et aurait sans nul doute instauré un climat malsain au sein de la coalition khmère. C'est là la pre-mière explication de la non-intervention militaire chinoise.
Depuis l'automne 1984, il existe une intense activité diplo-matique pour tenter de résoudre le problème khmer. De multi-ples tentatives de médiation ont été faites par S.E. Abe, ministre des affaires étrangères japonais, par S.E. Claude Cheysson, minis-tre des relations extérieures français, par S.E. Haydin, son ho-mologue australien, par S.E. Javier Perez De Cuellar, Secrétaire général de l'ONU, sans compter la diplomatie discrète des pays de l'ASEAN et la remarquée déclaration de S.E. Kapitsa faite à Bangkok en Mars 1984, selon laquelle l'URSS serait prête à participer à la recherche d'une solution au problème khmer.
De multiples petites phrases ont donc été prononcées qui témoignent d'une évolution diplomatique du problème. Si la Chine avait lancé sa 2ème punition, non seulement elle aurait été condamnée par la communauté internationale, mais elle aurait en outre accrédité la thèse viêtnarnienne selon laquelle il n'y aura jamais de solution à la question khmère, tant que subsistera la menace chinoise. Le pragmatisme de la direction chinoise conduit donc Pékin à laisser se développer toute cette activité diplomatique tout en réaffirmant, ici et là, sa position de prin-cipe. En fait, en n'intervenant pas militairement contre le Viêt-nam, la Chine participait activement à la recherche d'une solu-tion diplomatique et, de plus, se réservait la possibilité d'exercer d'autres types de pression quand l'évolution de la situation n'est pas conforme à ses intérêts, ce qui renforce, sa position en con-sequence.
Par ailleurs, en 1979, la Chine était intervenue après la déroute totale des KR pour leur laisser le temps de se réorga-niser. Aujourd'hui, la perte des camps de la résistance anti-viêt-namienne le long de la frontière thailandaise ne peut pas être comparée à la situation de 1979 car elle ne met pas en cause l'é-quilibre global des forces sur le terrain: à quoi servirait donc une punition chinoise alors que c'est le Viêtnam qui a consenti les plus lourds sacrifices pour son offensive?
Dernière explication enfin, éclairée par le pragmatisme de l'actuelle direction chinoise: la politique intérieure et extérieure de Hanoï crée des tensions internes ou, pour employer le lan-gage marxiste, des contradictions sous forme de conflits au sein de l'appareil du Parti Communiste viêtnarnien. Ces contradic-tions, illustrées par les récents procès organisés contre des dis-sidents, affaiblissent le pouvoir viêtnarnien et constituent une pression endogène. Une intervention militaire de la Chine n'au-rait pour effet que d'offrir aux dirigeants viêtnarniens la possi-bilité de refaire une unité de combat contre l'ennemi et le danger extérieurs, ce qui renforcerait leur position qui est actuellement délicate. Le fait pour Pékin de ne pas intervenir contribue donc à maintenir les dirigeants de Hanoï sous la pression de leurs con-tradictions internes, laquelle s'ajoute aux pressions militaires de la résistance khmère au Cambodge où l'armée viêtnarnienne ren-contre toujours autant de difficultés.
"Les observateurs et analystes qui ont pensé que la Chine pourrait sacrifier l'amitié qui la lie aux petits pays du Tiers-Monde tels que le Cambodge, dans le seul but de normaliser ses relations avec l'URSS, alors que les obstacles fondamentaux me-naçant sa sécurité ne sont toujours pas levés commettent une profonde erreur. En effet, d'entre les 3 Super Grands, la RPC est sans doute celui qui possède le plus de crédit dans le Tiers-Monde. Abandonner le Cambodge serait une atteinte irrémé-diable à son image de marque et le jeu n'en vaut pas la chandelle car la RPC a tout son temps, or, le temps, ce sont les milliards de US dollars dépensés par l'URSS pour .financer la vaine aven-ture viêtnamienne au Cambodge. La RPC a simplement envoyé la balle dans le camp viêtnamien: aux dirigeants de Hanoi de déterminer ce qu'ils veulent en faire". (Rf. Funcinpec-Info no4 et 5, Février-Mars 1985, # Sisowath Thomico).
En Février 1985, l'Indonésie qui avait imprimé une nouvel-le orientation à la politique des pays de l'ASEAN face au Viêt-nam, a dû, par la voix de S.E. Adam Malik, Vice-Premier Minis-tre, reprendre une position de fermeté en déclarant que les pays de l'ASEAN devraient monter des manoeuvres militaires con-jointes en Thailande, pour montrer aux dirigeants de Hanoï leur volonté de ne pas succomber aux manoeuvres d'intimidations viêtnamiennes. Si les viêtnamiens reculent sur les fronts mili-taires et diplomatiques, les nationalistes khmers, et plus précisé-ment Sihanouk lui-même, ont repris l'offensive définitive.
Dans une interview télévisée diffusée le 20 Juin 1986 à Bangkok, M. Michel Annacost, Secrétaire d'Etat américain pour les affaires politiques, a déclaré que les Etats-Unis n'envisage-ront pas la normalisation de leurs relations avec le Viêtnam sans le règlement politique du problème du Cambodge ainsi que le retrait de toutes les troupes viêtnamiennes du Cambodge. M. Annacost a dit que les Etats-Unis avaient constaté le renforce-ment graduel de la résistance khmère et l'accroissement progres-sif de l'efficacité du GCC sans voir la consolidation du régime pro-viêtnamien installé au Cambodge par le RSVN, qui a en-core besoin d'y maintenir des centaines de milliers de soldats. Il a aussi indiqué que "les forces de la résistance opèrent à l'inté-rieur du Cambodge et se sont établies dans l'ensemble du pays".
Par ailleurs, le 10 Juin 1986, lors d'une Conférence de pres-se donnée à Bangkok, S.E. Vernon Walters, représentant perma-nent des Etats-Unis à l'ONU, a dit que la position des Etats-Unis à l'égard du Cambodge est que le peuple khmer doit pouvoir choisir son propre avenir sans aucune intervention étrangère. L'Ambassadeur Walters a précisé que la première question du Cambodge est le retrait des troupes étrangères et la conclusion d'un accord, qu'il a discuté avec des dirigeants thailandais, du problème khmer qui est, a-t-il dit, un problème d'intérêt commun dans le cadre des Nations-Unies.
Le 19 Juin 1986, à Paris, M. Hu Yao Bang, Secrétaire Géné-ral du Parti Communiste Chinois a renouvelé la demande de la RPC pour le retrait des troupes viêtnamiennes du Cambodge lors d'une Conférence de presse tenue à la fin de sa visite officielle en France.
M. Hu Yao Bang a indiqué que c'est seulement après le retrait des troupes viêtnamiennes, que le Cambodge pourra deve-nir un Etat de paix, indépendant et non-aligné. La poursuite du soutien soviétique à l'occupation viêtnamienne du Cambodge constitue un obstacle à la normalisation des relations entre la RPC et l'URSS, a dit M. Hu Yao Bang. Il a indiqué que la RPC souhaite le rétablissement des relations traditionnelles avec le RSVN, mais que les autorités viêtnamiennes n'ont montré jus-qu'ici aucun signe de sincérité à cet égard. Par conséquent, pro-céder à un dialogue maintenant ne peut que constituer une perte de temps et une tromperie pour la communauté internationale.
Dans les mois qui suivent l'invasion et l'occupation du Cam-bodge par les troupes viêtnamiennes, le climat international est en crise: récession dans la plupart des pays occidentaux, affaire des Euro-missiles qui inquiète profondément les Européens et divise les opinions publiques, l'invasion de l'Afghanistan par l'-Armée Rouge, punition de la Chine à la RSVN créant un vérita-ble précédent dans les relations entre pays communistes, et af-faire des otages de l'Ambassade américaine à Téhéran qui ébran-le complètement l'administration Carter qui n'en avait guère besoin.
La question khmère n'est donc qu'une péripétie parmi des évènements tous plus dramatiques les uns que les autres, mettant en péril la paix mondiale. La première réaction de Sihanouk sera donc de profiter de la confusion internationale pour tenter de ré-gler directement avec les dirigeants de Hanoï le problème khmer avant que celui-ci ne dépasse ses principaux protagonistes, à sa-voir les khmers et les viêtnamiens eux-mêmes.
Après avoir rédigé son livre, et avant même que celui-ci ne soit édité, Sihanouk lancera de Pyong Yang un appel à la créa-tion d'un vaste rassemblement des khmers non communistes, la Confédération des khmers nationalistes, dans le but de donner une large assise populaire à ses efforts pour établir un dialogue entre lui et les dirigeants de Hanoï. Pour justifier l'évincement des khmers-rouges de ce rassemblement, il les accusera de n'être que les instruments de la RPC dans la guerre que se livrent les 2 églises communistes, celle des léninistes de Moscou et celle des marxistes de Pékin, par viêtnamiens et khmers interposés. Pour le prince Sihanouk, tant que cette guerre idéologique servira de toile de fond au problème khmer, elle empêchera toute solution rapide à celui-ci. Seuls les nationalistes khmers, unis dans la re-cherche d'une même solution, pourraient servir d'interlocuteurs valables pour le Viêtnam.
En Décembre 1979, devant plus de 4.000 réfugiés khmers de France et d'Europe réunis au Pavillon Baltard, il développe ce thème et conclut en demandant à ses compatriotes de lui laisser le temps de convaincre Hanoï du bien-fondé de son analyse et d'accepter de négocier avec lui les conditions de leur retrait du Cambodge. A cette occasion, il révèle qu'il écrira 3 lettres à Pham Van Dong, alias Lam Ba Kiêt, premier ministre viêtnamien, pour le persuader de conclure rapidement le différend khméro-viêtnamien sans la participation des communistes pro-chinois.
Malheureusement, le Prince ne sera pas suivi dans cette ten-
tative de dialogue et ce, principalement, à cause de la méfiance qu'il inspire à certains groupes de khmers ainsi qu'à une Coali-tion d'intérêts entre les pays de l'ASEAN, les USA qui n'ont ja-mais cru à l'indépendance de Sihanouk par rapport à Pékin, et la RPC qui craignait une solution contraire à ses intérêts. C'est ainsi que le 9 Octobre 1979, pour bien montrer son hostilité aux propositions du Prince, Son Sann, ancien premier ministre du royaume du Cambodge, crée le FNLPK, qui constitue en lui-même et à cause de la date de sa création un désaveu de la poli-tique de Sihanouk et une attaque personnelle contre lui.
De même, alors que Sihanouk propose aux différentes ins-tances internationales de voter en faveur de la vacance du siège du Cambodge parce que ses représentant légaux -les communis-tes pro-chinois ou les khmers-rouges- ne peuvent, légitimement représenter une nation qu'ils ont détruite, l'ONU votera massive-ment grâce à la pression de l'ASEAN, de la RPC et des USA, pour le maintien de la République Démocratique du Kampu-chéa.
En Janvier 1980, lorsque Sihanouk retourne en Corée du nord, c'est pour annoncer sa retraite politique qui correspond à une période durant laquelle il précisera sa position par rapport aux KR et au FNLPK, ainsi que sa vision de l'environnement in-ternational du problème khmer. Au moment-même où le FNLPK était créé, la Confédération des khmers Nationalistes (CKN) était décédée avant de naître. En effet, pour réussir, la CKN se devait de rassembler tous les khmers non communistes autour de Siha-nouk et en vue d'une solution rapide à la question khmère. De ce fait, lorsque samdech annonce sa décision de démissionner de la présidence de ce mouvement, la CKN deviendra un corps sans âme. Cette âme, Sihanouk allait s'attacher à la lui rendre.
Depuis sa création, le FNLPK ne s'était jamais déterminé en faveur d'une solution précise du problème khmer. De ce fait, pour se démarquer du laxisme politique du mouvement de Son Sann, et pour rallier ses partisans autour de propositions concrè-tes, Sihanouk recommencera à faire publier par son secrétariat son Bulletin Mensuel de Documentation dans lequel il s'adresse directement à ses compatriotes et précise, point par point, les principaux éléments de sa position vis-à-vis du problème khmer. Si le FNLPK pèche par laxisme et irréalisme politique, les KR sont inacceptables aux yeux de Sihanouk à cause de leurs crimes passés et de leur alliance totale avec la RPC dont les intérêts fondamentaux sont en désaccord avec ceux du RSVN dans la région. Les KR sont alors un obstacle à toute solution. Sur le plan international, à part un consensus total dans la condamna-tion du Viêtnam, il n'existe toujours aucune action diplomatique en vue de faire évoluer la situation. Trois groupes de pays se distinguent alors précisément: le Viêtnam, soutenu par l'URSS et ses alliés, la Chine Populaire et les pays de l'ASEAN soutenus par les Etats-Unis d'Amérique.
En 1980, tous ces pays s'interrogent encore sur les axes de leur politique vis-à-vis du problème khmer. Si leurs intérêts sont clairs, leur politique ne l'est pas encore. C'est dans ce climat d'-incertitude que Sihanouk cherchera à faire valoir ses idées, com-prendre ses propositions et en accepter le bien-fondé. Pendant ce temps, la RPC fera tout ce qu'elle pourra pour convaincre alter-nativement Sihanouk et Son Sann d'accepter une union avec les khmers-rouges alors que des pressions s'exercent pour que les Nationalistes s'unissent sous une même bannière.
Dès 1980, l'idée d'une Union sacrée entre tous les mouve-ments khmers commence à cheminer. Cependant les positions de chacun d'eux reste alors radicalement divergents:
- Sihanouk étant attaché à l'idée d'une solution politique,
- les pro-chinois restant les tenants d'une solution militaire, de la "victoire totale".
- le FNLPK tentant de se donner une identité par une atti-tude critique envers le Prince d'un côté et les KR de l'au-tre.
Au début de l'année 1981, Sihanouk invite plusieurs person-
nalités khmères à un congrès à Pyong Yang au terme duquel sera créé le Front Uni National pour un Cambodge Indépen-dant, Neutre, Pacifique et Coopératif (FUNCINPEC). Désormais, la résistance contre l'occupation viêtnamienne au Cambodge pos-sède 3 mouvements distincts pouvant permettre une unification structurelle sans trop de déséquilibre entre chacun d'eux. Aussi-tôt créé, le FUNCINPEC réaffirme en même temps que samdech Sihanouk, son président, les principaux points de sa position à l'égard de la question khmère. Cette position sera résumée dans une lettre ouverte de Sihanouk aux participants à la Conférence Internationale sur le Cambodge, réunie sous l'égide de l'ONU à New York en Juillet 1981.
Lorsqu'en Août 1981, Son Sann rend visite à Sihanouk à Mougins (France), et lorsque les 3 leaders de la résistance anti-viêtnamienne se réunissent tous ensemble, pour la première fois depuis 1979, le 4 Septembre 1981 à Singapour, les bases d'une Coalition étaient jetées. Ils signent, à cette occasion, un "Com-muniqué conjoint" dans lequel ils affirment leur volonté de taire leurs différends et d'unir leurs efforts dans la lutte anti-viêtna-mienne au Cambodge. Samdech Sihanouk (FUNCINPEC: Front Uni National pour un Cambodge Indépendant, Neutre, Pacifique et Coopératif), Samdech Son Sann (FNLPK: Front National de Libération du Peuple Khmer) et Monsieur Khieu Samphan (FGUNPDK: Front de Grande Union Nationale Patriotique et Démocratique du Kampuchéa) tournaient ensemble une page de l'histoire du Cambodge. Cependant, ni Sihanouk, ni le FUN-CINPEC n'ont abdiqué leur volonté d'unité, sinon d'union, avec le FNLPK, et par le biais d'une coopération renforcée à tous les niveaux, soutenus par une base de plus en plus lasse de querelles stériles, ils conservent l'espoir d'y parvenir à terme.
Les 22 Juin 1982 la Coalition verra véritablement le jour à Kuala Lumpur et ouvrira un nouveau chapitre dans la lutte con-tre l'agression viêtnamienne Sur le plan international, la situation s'est également peu à peu décantée. Au sein de l'ASEAN, l'Indo-nésie et la Malaisie se sont, dès 1983, prononcées en faveur de l'ouverture d'un dialogue avec la RSVN, dialogue qu'ils n'ont d'ailleurs jamais rompu. Dans le même temps, l'Australie, à la faveur d'un changement de majorité parlementaire et gouverne-mentale, se propose de servir d'intermédiaire dans cet éventuel dialogue. En Europe, la France et la Suède avaient déjà adopté la même attitude depuis le début du conflit. La RPC restait le seul pays à refuser ce dialogue avec le RSVN et s'isolait donc du reste d'une Communauté Internationale soucieuse de résoudre rapidement et pacifiquement le problème khméro-viêtnamien.
Les 2 objectifs de la stratégie de Sihanouk consécutive à la création du GCKD sont donc partiellement atteints. Ils concou-raient tous 2 à augmenter la pression politique et diplomatique sur le Viêtnam pour le forcer à accepter des négociations, en lui faisant supporter l'entière responsabilité de l'impasse diploma-tique du problème. Cependant, l'intransigeance de la RPC d'un côté, et le manque d'unité entre les 3 composantes de la coalition de l'autre, ont constitué des encouragements au Viêtnam dans sa politique de force. La récente offensive viêtnamienne est une illustration de cette politique de force et de sa volonté d'imposer une solution militaire identique à celle de la Chine et de la fac-
tion de Khieu Samphan.
Les termes de l'équation khmère restent donc inchangés et seul le rapport des forces évolue. Sur le plan militaire, la pres-sion s'accentue sur le Viêtnam pendant que ses efforts en vue de diviser les 3 factions khmères entre elles aboutissent à l'effet inverse, et que la contradiction entre ses propos rassurants et la violence de ses actions militaires lui ôte le peu de crédit lui restant. Même si Sihanouk ne la souhaite pas, la solution mili-taire pourrait bien, du fait du seul Viêtnam, rester la seule envi-sageable et ses récentes déclarations publiques aussi bien que privées vont dans ce sens.
Quoi qu'il en soit, il faut que Hanoï se persuade que le temps travaille en faveur de l'unification progressive des forces de la résistance khmère et que, peu à peu, l'objet d'éventuelles négociations s'amenuise. D'un problème international en 1979, l'occupation du Cambodge est devenue un problème régional. Lorsque la résistance khmère sera totalement privée de ses spon-sors, il ne restera qu'un problème bilatéral entre le Cambodge et le Viêtnam. Les khmers, dépossédés de leur pays, n'ont plus rien à perdre. Le Viêtnam, au contraire pourrait être l'unique perdant dans ce jeu.
L'Union nationale!... Quelle union? Il est courant d'enten-dre que les khmers souhaitent voir réaliser l'Union nationale. A écouter les opinions émises, je constate que les uns veulent une union unitaire, alors que les autres se contentent d'une union pluraliste. Il serait donc intéressant de savoir quelle union conviendrait le mieux au peuple khmer, dans le contexte actuel. Les partisans de l'union unitaire n'ont fait, jusqu'ici, qu'exprimer leur désir sans se soucier de savoir comment la réaliser. Selon eux, le dicton "l'Union fait la force", le patriotisme et le rapport des forces en présence -l khmer contre au moins 3 ou 4 viêtna-miens- suffisent pour mener les khmers à s'unir en un seul corps s'ils veulent mener à bien leur lutte de libération nationale. Ils soutiennent que cette lutte ne serait crédible qu'à condition que le peuple khmer s'unisse au sein d'un mouvement de résistance unique, dirigé par un Chef unique, accepté par tous. On a cité, pour appuyer cette idée, des noms célèbres de chefs de résis-tance dans d'autres pays, comme le général Charles De Gaulle en France et de Mao Tse Toung en Chine Populaire. Mais on oublie souvent qu'au temps de la résistance française contre l'-occupation allemande le général d'armée Henri Giraud co-pré-side avec De Gaulle le Comité Français de Libération Nationale. Quant à la résistance chinoise contre l'occupation étrangère, elle fut conjointement menée par les Communistes, et les Nationa-listes dirigés par le maréchal Chiang Kai Chek, sans qu'il y ait de direction unitaire.
Le désir de réaliser cette union "unitaire" est très légitime et ce serait parfait si l'on pouvait atteindre cet objectif. Mal-heureusement il ne s'agit là que d'une utopie qui n'existe que dans l'imagination. Dans un groupe d'individus, et, à fortiori, au sein d'une Nation -si petite soit-elle- les intérêts des uns ne coïn-cident pas toujours avec ceux des autres et l'intérêt général n'est pas toujours perçu de la même façon par tous. Il est donc naturel qu'à l'intérieur de toute collectivité existent des relations diffi-ciles ou même conflictuelles. On peut les admettre, pourvu qu'-elles ne nuisent pas à l'intérêt supérieur de la Nation.
Actuellement, dans le cas du Cambodge, 3 mouvements au sein d'une Coalition. Leur dénominateur commun est constitué par leur ferme détermination de combattre l'expansionnisme viêt-namien. Mais comment mener efficacement ce combat? C'est à cette question que répondent les partisans de l'union pluraliste. Ils espèrent que, malgré la diversité de leurs tempéraments et de leurs choix politiques, les dirigeants de ces mouvements trou-veront suffisamment de hauteur de vue et de noblesse de coeur pour servir la nation en bonne intelligence et en étroite colla-boration les uns avec les autres. Pourtant les opinions divergent encore sur ce point: certains désirent une union entre nationa-listes uniquement, d'autres, une union sans exclusive. Les pre-miers soutiennent la fusion du FNLPK avec le FUNCINPEC ou, tout au moins, une coopération renforcée entre eux. Du fait que ces 2 mouvements soient très proches l'un de l'autre sur le plan idéologique, leur union ne serait effectivement pas impossible. Mais quel serait le but de cette Union? Si l'Union des 2 mouve-ments nationalistes (les sihanoukistes et les républicains) est des-tinée à remplacer la coalition tripartite actuelle comme le récla-ment ouvertement certains, elle devient source de dangers pour la lutte nationale de libération.
En effet, au lieu d'unir davantage, elle ne ferait que diviser; au lieu de travailler en faveur de la réconciliation nationale, elle promouvoit, d'une certaine manière, l'esprit de revanche, ce qui a pour conséquence directe d'affaiblir les forces de résistance au bénéfice du seul agresseur viêtnamien. Cette forme d'union ne correspond ni aux souhaits des pays amis, ni aux aspirations pro-fondes du peuple khmer qui désire la paix civile et la concorde nationale.
En revanche elle correspond aux espoirs viêtnamiens qui ne cessent de chercher tous les moyens pour diviser les rangs de la résistance khmère aussi bien que le bloc des Nations qui sou-tiennent celle-ci. Il serait souhaitable que ceux qui cherchent à promouvoir ce type d'Union sélective méditent sur toutes les conséquences qui ne manqueraient pas de rejaillir inéluctable-ment sur le peuple khmer qui ne prendra part plus massivement à la lutte actuelle que dans la perspective d'un retour immédiat à la paix après le retrait viêtnamien. Par contre, si le resserrement des liens entre le FNLPK et le FUNCINPEC n'est dicté que par le souci d'équilibre des forces en présence au sein de l'actuelle coalition, il est de nature à n'inquiéter personne. La liaison étroi-te des 2 mouvements nationalistes est même indispensable car la réunion de leurs 2 forces pourrait constituer une sorte de dissua-sion vis-à-vis du FGUNPDK qui n'a pas encore recouvré la confiance du peuple khmer. Elle serait, en conséquence, de na-ture à rassurer ceux qui ont encore des doutes sur la nouvelle orientation politique proclamée par la 3ème composante. Du mo-ment qu'elle tend à raffermir la force des nationalistes sans pour autant chercher à freiner manu militari le développement des forces du 3ème partenaire, elle ne fait aucun obstacle à l'actuelle coalition. Les défenseurs de cette dernière formule d'union, pour appuyer leur point de vue, soutiennent en particulier que l'Union tripartite a remporté l'adhésion de la majorité des membres des 3 mouvements, en même temps qu'elle a été fortement souhaitée par les pays amis.
En effet, c'est après consultation et informations préalables de leurs partisans respectifs que les dirigeants des 3 mouvements se sont rencontrés à plusieurs reprises et ont convenu finalement de mettre sur pied le présent GCC. C'est donc une union libre-ment consentie par chacune des parties qui a pris ses décisions en toute connaissance de cause et de conséquence. Par ailleurs, la porte du GCC reste ouverte à toute autre faction khmère pourvu qu'elle ne coopère pas avec les envahisseurs viêtna-miens. En outre, parce qu'il a été souhaité par les pays amis du Cambodge, le GCC bénéficie d'un soutien et des aides militaires toujours accrues de la communauté internationale.
Pour ne citer qu'un exemple, depuis 2 années consécutives la question du siège n'a même pas été posée devant l'Assemblée Générale des Nations-Unies et la Résolution condamnant l'occu-pation du Cambodge par les troupes viêtnamiennes et exigeant le retrait de celles-ci a été votée à une majorité jamais atteinte depuis 7 ans: 114 voix contre 21 et 16 abstentions. Enfin, depuis qu'ils sont unis au sein de la coalition, les 3 mouvements ont reçu davantage d'aides étrangères -notamment en armes et muni-tions- qu'auparavant. Cela a permis à la résistance de renforcer ses positions et d'accentuer sa pression militaire, en particulier lors de la dernière saison sèche 1983-84. Ainsi, de toutes les for-mes d'union avancées par les uns et par les autres, seule la Coalition tripartite est actuellement crédible. Elle permet pour l'instant aux khmers de ne pas retomber dans une erreur com-mise dans un passé récent: l'exclusion d'une partie de la commu-nauté nationale de la vie démocratique pour des raisons politi-ques. Elle constitue ensuite la seule forme d'union pouvant don-ner satisfaction à la majorité des nations amies désireuses de soutenir la juste lutte de libération du peuple khmer. Il n'y a donc pas lieu de perdre son temps dans la recherche d'une nou-velle formule d'union. Il convient plutôt d'aller de l'avant, de soutenir les efforts de la Coalition et de l'aider à se renforcer davantage.
L'heure n'est plus aux sanglantes passions ou aux divisions fratricides: elle est à la raison et à la coexistence pacifique et à la recherche de la réconciliation nationale. C'est dans ce sens qu'-oeuvre le FUNCINPEC. Nombre d'observateurs se sont interro-gés sur la position de la RPC, de qui on attendait la 2ème punition après les revers des forces armées de la Coalition de 1984-85. Parmi leurs conclusions, certains ont été jusqu'à avancer qu'il existerait des accords secrets entre Pékin et Moscou conclus lors de la visite d'Arkhipov à Pékin en Novembre 1984. Ces analystes pensent donc que les négociations actuellement en cours entre ces 2 capitales ont évolué plus rapidement que ne le laissent penser les laconiques communiqués publiés par les 2 parties au terme des discussions. Une des conséquences de ces Accords serait un désengagement de la Chine vis-à-vis de la résistance khmère. De fait, il n'y a pas eu de 2ème leçon chinoise au Viêt-nam et ce, malgré les pressants appels lancés par Sihanouk en Février et Mars 1984. Interrogé à ce sujet à Paris, par un journa-liste français, un diplomate chinois en poste à Paris répondait que la Chine avait toujours eu pour principe de ne répliquer que lorsqu'elle était agressée. Le Viêtnam n'ayant pas agressé la Chine comme il l'avait fait en 1979, il n'y a pas eu de réplique. En clair, cela signifie que le contexte historique a évolué par rapport à 1979, ce qui implique nécessairement la mise en oeu-vre d'une autre politique.
Depuis l'arrivée au pouvoir de Deng Xiao Ping, la Commu-nauté internationale s'accorde pour affirmer que la nouvelle di-rection chinoise est pragmatique. De ce fait, au lieu d'analyser la politique khmère de Pékin par rapport à d'hypothétiques accords Sino-Soviétiques, il serait peut-être plus positif de le faire par rapport à la propre logique chinoise, éclairée, précisément, par ce
pragmatisme.
Trois points fondamentaux faisaient obstacle à une norma-lisation des relations Pékin-Moscou: le déploiement militaire so-viétique à la frontière chinoise, l'invasion de l'Afghanistan par l'Armée rouge, l'agression du Cambodge par la RSVN et les So-viétiques. Aucune évolution de la situation sur ces 3 points n'a pu être constatée et, en conséquence, les intérêts vitaux de la RPC restent toujours menacés. Tant que ses intérêts seront me-nacés, la logique veut que Pékin conserve toujours la même posi-tion de principe sur ces points. A partir de là, il est évident que l'absence de 2ème leçon chinoise ne signifie pas modification de la position chinoise vis-à-vis du problème khmer, sur le plan du principe. Il faut donc rechercher les causes de la passivité chi-noise ailleurs. En premier lieu, l'Armée populaire viêtnamienne n'a pas lancé son offensive simultanément mais successivement contre les bases du FNLPK et puis contre celles des KR et enfin celles de l'ANS/FUNCINPEC. Le fait pour la Chine d'intervenir après la chute de telle ou telle base pouvait être interprété com-me étant le signe évident du soutien particulier de Pékin à telle composante de la Coalition khmère. Or, Pékin soutient la résis-tance khmère dans son ensemble, et non pas telle ou telle fac-tion. Elle a affirmé, et prouvé par son rôle, qu'elle désirait entre-tenir des relations équidistantes avec les 3 mouvements formant la coalition. Déclencher une opération de représailles contre le Viêtnam pendant ou après les combats pour telle ou telle base aurait donc été une contradiction que Hanoï n'aurait certaine-ment pas manqué d'exploiter et aurait sans nul doute instauré un climat malsain au sein de la coalition khmère. C'est là la pre-mière explication de la non-intervention militaire chinoise.
Depuis l'automne 1984, il existe une intense activité diplo-matique pour tenter de résoudre le problème khmer. De multi-ples tentatives de médiation ont été faites par S.E. Abe, ministre des affaires étrangères japonais, par S.E. Claude Cheysson, minis-tre des relations extérieures français, par S.E. Haydin, son ho-mologue australien, par S.E. Javier Perez De Cuellar, Secrétaire général de l'ONU, sans compter la diplomatie discrète des pays de l'ASEAN et la remarquée déclaration de S.E. Kapitsa faite à Bangkok en Mars 1984, selon laquelle l'URSS serait prête à participer à la recherche d'une solution au problème khmer.
De multiples petites phrases ont donc été prononcées qui témoignent d'une évolution diplomatique du problème. Si la Chine avait lancé sa 2ème punition, non seulement elle aurait été condamnée par la communauté internationale, mais elle aurait en outre accrédité la thèse viêtnarnienne selon laquelle il n'y aura jamais de solution à la question khmère, tant que subsistera la menace chinoise. Le pragmatisme de la direction chinoise conduit donc Pékin à laisser se développer toute cette activité diplomatique tout en réaffirmant, ici et là, sa position de prin-cipe. En fait, en n'intervenant pas militairement contre le Viêt-nam, la Chine participait activement à la recherche d'une solu-tion diplomatique et, de plus, se réservait la possibilité d'exercer d'autres types de pression quand l'évolution de la situation n'est pas conforme à ses intérêts, ce qui renforce, sa position en con-sequence.
Par ailleurs, en 1979, la Chine était intervenue après la déroute totale des KR pour leur laisser le temps de se réorga-niser. Aujourd'hui, la perte des camps de la résistance anti-viêt-namienne le long de la frontière thailandaise ne peut pas être comparée à la situation de 1979 car elle ne met pas en cause l'é-quilibre global des forces sur le terrain: à quoi servirait donc une punition chinoise alors que c'est le Viêtnam qui a consenti les plus lourds sacrifices pour son offensive?
Dernière explication enfin, éclairée par le pragmatisme de l'actuelle direction chinoise: la politique intérieure et extérieure de Hanoï crée des tensions internes ou, pour employer le lan-gage marxiste, des contradictions sous forme de conflits au sein de l'appareil du Parti Communiste viêtnarnien. Ces contradic-tions, illustrées par les récents procès organisés contre des dis-sidents, affaiblissent le pouvoir viêtnarnien et constituent une pression endogène. Une intervention militaire de la Chine n'au-rait pour effet que d'offrir aux dirigeants viêtnarniens la possi-bilité de refaire une unité de combat contre l'ennemi et le danger extérieurs, ce qui renforcerait leur position qui est actuellement délicate. Le fait pour Pékin de ne pas intervenir contribue donc à maintenir les dirigeants de Hanoï sous la pression de leurs con-tradictions internes, laquelle s'ajoute aux pressions militaires de la résistance khmère au Cambodge où l'armée viêtnarnienne ren-contre toujours autant de difficultés.
"Les observateurs et analystes qui ont pensé que la Chine pourrait sacrifier l'amitié qui la lie aux petits pays du Tiers-Monde tels que le Cambodge, dans le seul but de normaliser ses relations avec l'URSS, alors que les obstacles fondamentaux me-naçant sa sécurité ne sont toujours pas levés commettent une profonde erreur. En effet, d'entre les 3 Super Grands, la RPC est sans doute celui qui possède le plus de crédit dans le Tiers-Monde. Abandonner le Cambodge serait une atteinte irrémé-diable à son image de marque et le jeu n'en vaut pas la chandelle car la RPC a tout son temps, or, le temps, ce sont les milliards de US dollars dépensés par l'URSS pour .financer la vaine aven-ture viêtnamienne au Cambodge. La RPC a simplement envoyé la balle dans le camp viêtnamien: aux dirigeants de Hanoi de déterminer ce qu'ils veulent en faire". (Rf. Funcinpec-Info no4 et 5, Février-Mars 1985, # Sisowath Thomico).
En Février 1985, l'Indonésie qui avait imprimé une nouvel-le orientation à la politique des pays de l'ASEAN face au Viêt-nam, a dû, par la voix de S.E. Adam Malik, Vice-Premier Minis-tre, reprendre une position de fermeté en déclarant que les pays de l'ASEAN devraient monter des manoeuvres militaires con-jointes en Thailande, pour montrer aux dirigeants de Hanoï leur volonté de ne pas succomber aux manoeuvres d'intimidations viêtnamiennes. Si les viêtnamiens reculent sur les fronts mili-taires et diplomatiques, les nationalistes khmers, et plus précisé-ment Sihanouk lui-même, ont repris l'offensive définitive.
Dans une interview télévisée diffusée le 20 Juin 1986 à Bangkok, M. Michel Annacost, Secrétaire d'Etat américain pour les affaires politiques, a déclaré que les Etats-Unis n'envisage-ront pas la normalisation de leurs relations avec le Viêtnam sans le règlement politique du problème du Cambodge ainsi que le retrait de toutes les troupes viêtnamiennes du Cambodge. M. Annacost a dit que les Etats-Unis avaient constaté le renforce-ment graduel de la résistance khmère et l'accroissement progres-sif de l'efficacité du GCC sans voir la consolidation du régime pro-viêtnamien installé au Cambodge par le RSVN, qui a en-core besoin d'y maintenir des centaines de milliers de soldats. Il a aussi indiqué que "les forces de la résistance opèrent à l'inté-rieur du Cambodge et se sont établies dans l'ensemble du pays".
Par ailleurs, le 10 Juin 1986, lors d'une Conférence de pres-se donnée à Bangkok, S.E. Vernon Walters, représentant perma-nent des Etats-Unis à l'ONU, a dit que la position des Etats-Unis à l'égard du Cambodge est que le peuple khmer doit pouvoir choisir son propre avenir sans aucune intervention étrangère. L'Ambassadeur Walters a précisé que la première question du Cambodge est le retrait des troupes étrangères et la conclusion d'un accord, qu'il a discuté avec des dirigeants thailandais, du problème khmer qui est, a-t-il dit, un problème d'intérêt commun dans le cadre des Nations-Unies.
Le 19 Juin 1986, à Paris, M. Hu Yao Bang, Secrétaire Géné-ral du Parti Communiste Chinois a renouvelé la demande de la RPC pour le retrait des troupes viêtnamiennes du Cambodge lors d'une Conférence de presse tenue à la fin de sa visite officielle en France.
M. Hu Yao Bang a indiqué que c'est seulement après le retrait des troupes viêtnamiennes, que le Cambodge pourra deve-nir un Etat de paix, indépendant et non-aligné. La poursuite du soutien soviétique à l'occupation viêtnamienne du Cambodge constitue un obstacle à la normalisation des relations entre la RPC et l'URSS, a dit M. Hu Yao Bang. Il a indiqué que la RPC souhaite le rétablissement des relations traditionnelles avec le RSVN, mais que les autorités viêtnamiennes n'ont montré jus-qu'ici aucun signe de sincérité à cet égard. Par conséquent, pro-céder à un dialogue maintenant ne peut que constituer une perte de temps et une tromperie pour la communauté internationale.

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